Accueillir le rapport de la CIASE
16 décembre 2021 - Il y a quelques jours a eu lieu à La Ferme la seconde d’une série de sessions co-organisées avec le Diocèse de Beauvais, autour de la réception du rapport de la CIASE. Nous avons posé quatre questions à Geneviève qui a œuvré à l'organisation de ces sessions à destination des prêtres, religieux et religieuses, et laïcs engagés pour le Diocèse.
La Ferme : Qui es-tu, Geneviève ?
Geneviève : Aujourd’hui je suis présente ici, à La Ferme, en raison d’une triple appartenance : je suis membre du Conseil d’Administration de La Ferme, membre du service de la vie spirituelle du Diocèse de Beauvais, et enfin, victime de violences sexuelles dans mon enfance, je fais partie des personnes qui ont témoigné à Lourdes en 2018 et participé ensuite au travail, avec la Conférence des Evêques de France, autour des violences sexuelles sur mineurs dans l’Eglise de France.
La Ferme : Peux-tu nous présenter la session en cours ?
Geneviève : Il s’agit d’une série de sessions co-organisée entre La Ferme, le Diocèse et les personnes victimes. Chaque session est agencée autour des apports de cinq intervenants principaux : deux « victimes temoins », un(e) psychanalyste, un théologien, et un membre de la CIASE. Le contenu de la session se tisse aussi, bien entendu, des contributions du public présent : prêtres, religieux et religieuses, et laïcs en mission pour le Diocèse. La session dure deux jours : la première journée est consacrée à « Nommer le mal » en mettant au centre le témoignage des victimes. La seconde journée est consacrée à « l’Avenir » et, là encore, on part de la contribution des personnes victimes. L’objectif des sessions est d’aider les participants, des gens engagés dans l’Eglise, à écouter les victimes, à mieux connaître les traumatismes et les conséquences de l’emprise et des violences sexuelles, et à traverser individuellement et collectivement cette page difficile de l’histoire de l’Eglise.
La Ferme : Pourquoi organiser ces sessions à La Ferme ?
Geneviève : Avec son expérience des sessions « Traverser notre histoire », organisées pour aider les membres de L’Arche à regarder en face et à intégrer les révélations sur Jean Vanier, La Ferme a une expérience de ce type de sessions. Par ailleurs, La Ferme est un lieu chaleureux et familial, un cadre qui convient bien pour cette expérience. Il est certain que, marqué lui-même par un passé avec sa part d’ombre, le lieu de La Ferme n’a pas manqué de faire réagir certains participants au départ. Mais à l’issue, tous sont partis renouvelés, heureux d’avoir vécu ces sessions au milieu de la communauté qui les accueillait.
La Ferme : Quels fruits as-tu vus après les premières sessions ?
Geneviève : Les premiers participants ont évoqué « un moment de synodalité authentique », « une expérience d’Eglise avec une liberté de parole et une profondeur dans les échanges, rarement connus jusqu’alors ». C’est une expérience un peu unique, qui a permis une prise de conscience douloureuse, personnelle et communautaire, de la gravité de l’emprise et des violences sexuelles sur mineurs et personnes vulnérables, et de la part de responsabilité lié au fonctionnement de l’institution Eglise. Cela permet à chacun de revoir sa manière d’être et de se projeter dans une Eglise à venir : choisir l’humilité, choisir l’humain, les plus petits, choisir d’abord de vivre « avec » avant de vouloir agir « pour ». À ce titre, organiser ces sessions au sein de L’Arche est, à mon sens, un choix particulièrement symbolique et porteur d’espérance.